Ce deuxième album de l’Ecossais Gareth Dickson n’en est pas vraiment un,
premièrement parce qu’il n’est pas sorti en tant que tel, deuxièmement
parce qu’il est constitué de titres épars dont certains probablement
volontairement non inclus sur son album ‘Spruce Goose’, tandis que les
autres plus récents s’inscrivent sous influence revendiquée de la scène
électronique (Aphex Twin, Boards of Canada), même si pas la moindre
trace digitale à l’horizon. Pas vraiment sorti parce qu’il ne s’agit que
d’un des treize cdrs sortis dans un coffret, ‘Minerals Box’ par un
label expérimental écossais.
Gareth précise d’ailleurs dans le mot qui accompagne ma copie, ‘It's
therefore not very cohesive but you might find it interesting anyway’.
Et combien ! Ca fait quelques jours que ce disque tourne en boucle,
calmement à volume très modéré, audible simplement si on y prête
attention, distillant toute la science du fingerpicking de Gareth,
enveloppée de brumes, résonance et réverb, additionnée sur quelques
titres d’un chant chuchoté, une démarche très minimaliste, épurée,
réduite à l’essentiel, austère par certains aspects. Probablement que
celle-ci condamne Gareth à une certaine discrétion, limitant l’effet de
séduction de sa musique et sans doute l’envie d’y revenir, aussi
signifiante qu’elle peut être lorsque l’on s’y trouve capturé.
Mais pourtant les morceaux se succèdent tout en finesse et
subtilité, naturels et spontanés ne trahissant nul arrivisme ou ambition
particulière. Du calme, presque anodin ‘Agoa’, qui pourrait laisser
penser qu’un disque de fingerpicking de plus, à la John Fahey, nous
attend, on glisse vers des ambiances champêtres et folk de ‘Amber Sky’
où l’on croise le chant hésitant, chuchotant mais pas complètement
dégrossi de Gareth, mais le charme opère et nous propulse dans une autre
dimension ; le disque peut alors progresser, nous voilà transportés.
D’autant que l’extase nous attend en plage trois, un ‘Climbing’ en
apesanteur, cette joie et légèreté d’arriver au terme d’une escalade et
de pouvoir poser le regard à 360° d’un promontoire naturel alors que le
ciel est calme et quasiment immobile et plonge l’univers qui nous
entoure dans une quiétude opulente que ne viennent troubler que chants
d’oiseaux et murmures de cascades. C’est beau, terriblement beau. Avec
‘if I’ en parfaite suite plus contemplative encore, puis ‘Harmonics’ qui
glisse entre les nuages blancs, comme gonflé à l’hélium, juste menacé
de failles mélancoliques profondes, on ne touche plus le sol, en
parfaite apesanteur et introversion solaire.
Fin d’un cycle. Dès ‘The Dance’, on glisse vers une autre part, plus
sombre et légèrement oppressante, ce morceau est le premier de quatre
composés dans une optique et sous une influence électronique même s’ils
ne le sont pas en eux-mêmes. Ca débute comme une impression de pluie
froide et tenace, pas forcément agréable, mais où l’on sent bien en
filigrane l’influence de l’Aphex Twin des débuts. ‘The Wine’ persévère
dans cette tentative de traduction sans que l’on puisse réellement y
trouver bénéfice. Bizarrement, ‘Electro’ me fait vaguement penser à
certaines expérimentations instrumentales de Brian Eno. Seul ‘Solina
Sea’, qui donne son titre à l’album tire vraiment la tête de l’eau parmi
ces tentatives et encore, sans doute parce que cette plage ne s’y
adonne pas complètement, tentant plutôt une forme de pont. Je doute que
Gareth Dickson ait réellement intérêt à persévérer dans cette voie, pour
preuve la sensation de fraîcheur qui s’empare de nous lorsqu’il en
revient à ses premières amours sur un ‘Noon’ envoûtant.
Bref au total, ce second album de Gareth Dickson est relativement
inégal, mais contient toutefois une moitié de vraies pépites à faire
défaillir l’amateur de folk intimiste dévoué à une approche purement
fingerpicking monotone mais troublante.
http://www.garethdickson.com/
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